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Vital Rodier (Frère Clément) : Biographie

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Vital Rodier (Frère Clément)

Né le 25 mai 1839
Décédé le 20 novembre 1904
Pépiniériste
Créateur du Clémentinier (clémentine).

Les vertes années de Vital Rodier, avant le Frère Clément et la clémentine (1839-1859)

Vital Rodier, futur Frère Clément, est né le 25 mai 1839 à Malveille (Puy-de-Dôme).

Ses parents, Jean Rodier et Jacqueline Rodier née Communal, sont deux catholiques fervents. À l'image d'autres noms du jardinage, tels le Frère Henri ou Charles Plumier, Vital Rodier est poussé par ses parents vers la vie religieuse, bien qu'il soit leur unique fils (et enfant).

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Chartreuse de Valbonne

C'est ainsi qu'en 1852, à 13 ans, Vital Rodier rejoint l'Ordre des Chartreux. Cet ordre fondé en 1004 est régi par le « Consuetudines Cartusiae » ou « Coutumes de Chartreuse » qui impose un mode de vie très austère où la solitude tient une grande place. À ces coutumes s'ajoute le mode de vie éreintant de son monastère, la Chartreuse de Valbonne, rythmé par des activités comme la cuisine ou le jardinage mais aussi des travaux très physiques que le jeune Vital, chétif et à la santé fragile, supporte mal.

En 1854, alors que Vital Rodier est âgé de 15 ans, son oncle André Rodier, « prieur » (titre le plus haut dans la hiérarchie monastique après l'abbé) d'une communauté des Frères de Notre-Dame de l'Annonciation, part pour l'Algérie. Conscient que les Chartreux était un mauvais choix pour son neveu et inquiet de le savoir en train de dépérir à vue d'oeil, il convainc son frère de le lui confier, arguant qu'un ordre plus ouvert sur le monde que les Chartreux et avec un mode de vie plus stimulant, a fortiori pour un adolescent, s'imposait.

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Place de la République à Alger

La France est présente depuis 24 ans en Algérie lorsque Vital Rodier y débarque en 1854, il assiste alors à l'émergence d'un grand territoire. L'Algérie, qui n'était auparavant qu'un terrain occupé par des tribus plus ou moins autarciques sous la régence d'un Empire Ottoman à bout de souffle, est en train de s'éveiller grâce à des investissements français considérables, à la fois publics et privés. De grandes écoles voient le jour à Alger, qui deviendront des écoles supérieures de médecine, pharmacie, sciences, lettres et droit (unifiées en 1909 pour constituer l'actuelle Université d'Alger) et d'importants travaux d'inspiration haussmannienne sont mis en oeuvre, qui font d'Alger une capitale rayonnante. En parallèle, des routes, écoles primaires et secondaires, hôpitaux etc. fleurissent partout en Algérie ; par exemple l'Hôpital Mustapha Pacha, encore aujourd'hui le plus grand hôpital algérien, employant d'ailleurs le médecin et botaniste Louis Charles Trabut qui baptisera un jour... le Clémentinier et sa célèbre clémentine !

La communauté de frères que suivait Vital Rodier s'investissait dans le sort des orphelins. Originaires de Montpellier, ils eurent l'idée de les installer en Algérie afin qu'ils bénéficient des opportunités qu'offrait ce territoire en pleine naissance. A force de ténacité, ils obtinrent d'abord une concession de 30 hectares à Miserghin pour y construire un orphelinat, à 21km au sud-ouest d'Oran, puis une pépinière de 12 hectares. Ils transformèrent le domaine en une grande exploitation agricole, doublée d'ateliers où se formaient les orphelins français et algériens. C'est dans ce contexte qu'arrive Vital Rodier, après des années de travail et de persévérance pour que le projet voit le jour.

Seulement Vital Rodier est alors bien loin d'être l'arboriculteur qui va créer le Clémentinier et sa clémentine, n'ayant aucune formation dans le jardinage ou la botanique. Il va alors apprendre durant les années qui suivent, tout en s'investissant dans la vie religieuse et la gestion de l'orphelinat.

Frère Clément, découverte du jardinage et de l'arboriculture (1859-1866)

Après quelques années en Algérie au côté des Frères de Notre-Dame de l'Annonciation, Vital Rodier est à l'évidence dans son élément, tant sur le plan temporel que spirituel. En 1859, conformément à un usage initié par les jésuites au XVIe siècle et institutionnalisé par le pape Pie IX en 1857, il prononce des « voeux simples » appelés aussi « voeux temporaires ». Ces voeux n'engagent que pour quelques années de sorte qu'à leur terme, si le frère (les prêtres n'étant pas concernés) ressent l'envie de fonder une famille ou de servir Dieu autrement qu'à travers les ordres, il sera libre de suivre sa voie.

En 1866, le Frère Marie-Clément prononce ses « voeux perpétuels ». Bien qu'étant le Frère Marie-Clément en religion, c'est Frère Clément qui s'imposera dans le langage courant.

L'envol de la pépinière, lieu de naissance de la clémentine (1866-1894)

Désormais un fin connaisseur du jardinage et un arboriculteur digne de ce nom, le Frère Clément s'attaque à la pépinière de 12 hectares qui a jusqu'ici été largement négligée.

Le Frère Clément plante essentiellement des vignes et des agrumes, consacrant ainsi ses journées à la culture de la vigne, à l'arrosage des mandariniers, à l'entretien des Bergamotiers et autres Bigaradiers (Orangers amers).

La pépinière gérée par le Frère Clément croît vite et conquiert sans difficulté de nombreux clients, on s'y arrache les arbres fruitiers qui y sont cultivés. Le succès est tel que les 12 hectares de la pépinière ne sont finalement plus suffisants, celle-ci est alors agrandie, passant à 20 hectares et un vignoble de 35 hectares est crée pour lui. Une quarantaine d'ouvriers l'assistent dans son travail.

De la force de travail du Frère Clément, on trouve ce témoignage dans les archives de l'orphelinat:

« On peut dire que rien n'a été planté sans lui dans les 20 hectares de la pépinière et les 35 hectares du vignoble. C'est lui qui a introduit dans le pays plusieurs centaines d'espèces d'arbres forestiers, fruitiers ou d'ornement, sans compter une merveilleuse collection de rosiers qui comprenait près de 600 variétés des plus rares. Il obtint même et développa plusieurs variétés de plantes et de fruits, entre autres une espèce de mandarine, qui fait l'admiration des connaisseurs, et que les orphelins de l'établissement baptisèrent du nom de Clémentine. »

Clémentine, Clémentinier (1894-1900)

En 1894, les techniques de semis, méthodes de greffage et le bouturage n'ayant plus de secret pour lui depuis longtemps, le Frère Clément se lance dans la création d'hybrides.

La création la plus connue du Frère Clément est le Clémentinier, résultat, selon la version officielle de l'époque, d'une hybridation entre l'Oranger amer et le Mandarinier, crée en 1894 si l'on en croit sa pierre tombale. Des études récentes ont cependant démontré qu'il s'agissait en réalité de l'Oranger et du Mandarinier.

Douce, sucrée, sans pépin, la clémentine commence par faire le bonheur des orphelins qui dévorent la production. Marmelade de clémentine, jus de clémentine, tajine de clémentine etc. sont très vite tentés et approuvés par la communauté. Entre le clémentinier, la clémentine et les recettes à base de clémentines, c'est tout un commerce qui voit le jour.

Cela dit, jusqu'en 1902, à l'exception des orphelins qui parlent déjà de clémentine et de Clémentinier, le Clémentinier se nomme le Mandarinettier et la clémentine la mandarinette.

Les dernières années de Frère Clément, créateur de la clémentine (1900-1904)

À partir de 1900, désormais âgé de 61 ans et n'ayant plus une santé de jeune homme, le Frère Clément se retire peu à peu de la direction de la pépinière, restant néanmoins très actif au sein de celle-ci.

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Louis Charles Trabut

En 1902, un vieil ami également présent en Algérie depuis des décennies, Louis Charles Trabut, rebaptise la mandarinette à travers un article qu'il publie dans le dixième numéro de la Revue horticole française. En hommage au Frère Clément, elle se nomme désormais la Clémentine.

Le 20 novembre 1904, Vital Rodier, désormais Frère Clément, s'éteint. Celui qui, à son arrivée en Algérie, ne connaissait rien au jardinage, à la botanique ou à l'arboriculture, recevra à titre posthume la médaille d'or de la société d'agriculture d'Algérie, laissant derrière lui un fruit qui continue à faire le bonheur des plus petits, comme des plus grands !

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Publié par sur Jardin Secrets le 27-09-2014

Commentaires des internautes

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Il n'était pas fils unique, je suis une de ses petites cousines et j'ai sa généalogie sous les yeux.
bb2 | 11-09-2018 à 12:30:09 | Répondre

Bonjour

Ma famille est originaire de Malvieille et je serai intéressé de connaître s'il y avait une ou deux familles RODIER.

Pouvez-vous me contacter au 0611800366 ? Merci.

Jl Rodier | 29-08-2019 à 23:14:13 | Répondre