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Olivier de Serres : Biographie

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Olivier de Serres

Né en 1539 (jour exact inconnu)
Décédé le 2 juillet 1619
Agronome
Père de l'agronomie

Les vertes années d'Olivier de Serres (1539-1558)

Olivier de Serres est né dans le Vivarais (à peu de choses près l'actuelle Ardèche) à Villeneuve-de-Berg. Son père, Jacques de Serres, est un homme d'affaires à la tête d'une imposante fortune acquise dans le commerce. Il connaît ainsi une enfance privilégiée au sein de la bourgeoisie, s'intéressant peu à peu au jardinage par intérêt personnel et non à travers sa famille.

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François Ier et Henri II

La famille d'Olivier de Serres a la particularité d'être protestante dans une France où le protestantisme est de plus en plus mal vu. François Ier puis son fils Henri II, rois de France, le répriment avec sévérité. Cette répression pousse certaines familles protestantes assez puissantes pour se protéger des conséquences, tels les de Serres, à prendre publiquement fait et cause pour leur religion. Son frère cadet, Jean de Serres, deviendra d'ailleurs pasteur calviniste, lui deviendra diacre (n'impliquant aucune forme d'ordination contrairement aux diacres catholiques, Olivier de Serres n'était pas un religieux mais un « laïc » au service du calvinisme).

Alors qu'Olivier de Serres n'est qu'un enfant, son père décède. La fortune que laisse Jacques de Serres permet toutefois à sa veuve d'élever ses trois fils et ses deux filles dans le plus grand confort, du personnel à demeure veille sur eux et un précepteur s'occupe de l'instruction de Raymond et Olivier, Jean étant envoyé en Suisse.

De bonnes affaires et un mariage (1558-1572)

En 1558, il apprend que la seigneurie voisine de Jean Pastel, le domaine du Pradel, a été rachetée par M. de Pampelonne. Il semblerait que cet acquéreur ce soit montré très inconséquent en rachetant ce domaine, à l'évidence bien au-dessus de ses moyens. Olivier De Serres s'intéresse de près à l'affaire, y voyant la possibilité d'acheter sa place au sein de l'aristocratie.

Il s'empresse d'aller à la rencontre de M. de Pampelonne, qu'il sait désormais ruiné, afin de lui offrir de racheter le domaine, convaincu de l'avoir à très bon prix. M. de Pampelonne accepte de lui en vendre la moitié, soit le moulin de Brialas, ce qui lui permet de conserver la seigneurie. Olivier de Serres puise dans l'héritage familial, vend quelques terres dispersées et des biens en ville pour acquérir le moulin, sûr de racheter l'autre moitié bientôt et obtenir alors ce qu'il souhaite. Puis, le 20 juin 1557, acculé, M. de Pampelonne se résigne à lui vendre l'autre moitié ; soit le château du Pradel et une centaine d'hectares pour un peu moins de 4000 livres. Le même montant que Leyde offrira un siècle plus tard à Joseph Pitton de Tournefort comme pension pour y enseigner la botanique et qu'il refusera.

Olivier de Serres devient alors le propriétaire de la seigneurie, toutefois, compte tenu de son statut de roturier, on lui refuse la jouissance des droits féodaux (haute, moyenne et basse justice) sur son domaine. Lesdits droits sont la responsabilité du baron des Astars, faisant qu'Olivier de Serres ne porte pas le titre de seigneur.

Olivier de Serres a beau se passionner pour le jardinage depuis des années, il est conscient de ne pas être compétent pour gérer un tel domaine. Ne souhaitant pas répéter les erreurs de M. de Pampelonne, il confie le Pradel à un « métayer », M. Ranc. Celui-ci exploite alors le domaine moyennant une rente qui correspond sans doute, comme c'est l'usage, à la moitié des récoltes. De toute évidence, M. Ranc est l'homme de la situation et le futur du domaine semble assuré ; même sans le titre de seigneur, il devient alors un très bon parti et est convoité par nombre de jeunes filles. C'est finalement un notable, le juge d'Arçons, qui obtiendra pour sa fille Marguerite ce Saint-Graal.

Olivier de Serres et Marguerite d'Arçons se marient un an plus tard, le 11 juin 1559, le couple aura 7 enfants. Ils n'habiteront toutefois pas le château du Pradel avant 1578. Le domaine est surexposé et est un lieu de passage très fréquenté, or, en ces temps troubles pour les protestants, les guerres de religion faisant rage, les agressions sont monnaie courante et Olivier de Serres n'ayant pas le pouvoir d'interdire le passage sur ses terres, mieux vaut la sécurité d'un village fortifié des environs.

Si l'exploitation du domaine a été sous-traitée à un métayer, cela ne signifie pas qu'Olivier de Serres entend vivre passivement de sa rente. Il s'investit beaucoup dans l'exploitation, s'y rend plusieurs fois par semaine, participe aux grandes décisions et n'hésite pas à investir si le besoin s'en fait sentir.

Mais surtout, il fait de M. Ranc son professeur, Olivier de Serres veut devenir un exploitant pleinement compétent. Durant des années, en plus de ses lectures, il apprendra au côté de son métayer tous les aspects pratiques du métier de cultivateur. Ainsi, combinant la théorie et la pratique, le travail de la terre n'aura bientôt plus aucun secret pour lui.

En 1571, le baron des Astars, tel M. de Pampelonne en d'autres temps, éprouve de grandes difficultés financières. Olivier de Serres lui offre alors de lui acheter, comme il en a le droit, la suzeraineté du Pradel. Le baron accepte de la lui vendre en viager, c'est ainsi que de Serres devint officiellement, moyennant une rente à vie, le seigneur du Pradel.

Avoir un titre non-nobiliaire de seigneur le prive de certains privilèges, notamment fiscaux, mais il est suzerain de plein droit. Olivier de Serres s'empresse donc d'entamer la sécurisation de son domaine en contrôlant sa fréquentation. Le château du Pradel étant par ailleurs en mauvais état, il doit entreprendre d'importants travaux de rénovation pour le rendre habitable à nouveau. Encore quelques années et la famille pourra s'installer.

Massacre de la Saint-Barthélemy (1572-1578)

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Charles IX et Gaspard de Coligny.

En 1572, dans l'espoir de réconcilier catholiques et protestants après la troisième guerre de religion, Charles IX, roi de France, réintègre le chef des protestants, Gaspard de Coligny, dans le conseil royal. Sa mère, Catherine de Médicis, s'apprête à marier sa fille Marguerite à un protestant.

Le 18 août, le mariage a lieu alors même que le pape Grégoire XIII s'y était opposé. Pour la noblesse, très majoritairement catholique, c'est un affront. Les rues de Paris sont pleines de protestants venus pour le mariage, de surcroît somptueux alors que le peuple souffre terriblement de l'économie en berne du pays.

Le 22 août 1572, Gaspard de Coligny échappe de peu à une tentative d'assassinat.

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Henri Ier de Guise

Les protestants promettent une réponse, les nobles catholiques quant à eux, Henri Ier de Guise en tête, menacent de quitter la Capitale. Terrifié à l'idée d'être abandonné, Charles IX ordonne l'exécution des chefs militaires protestants pour satisfaire Henri Ier de Guise et les siens. La situation dégénère, les parisiens s'y mettent et les exécutions s'étendent à tous les protestants de Paris. La nuit du 23 au 24 août ce sont environ 3000 protestants qui sont massacrés à Paris.

Au regard de ces événements qui s'étendent ensuite à toute la France, Olivier de Serres prend les armes. Le 2 mars 1573, il participe à la prise de Villeneuve-de-Berg par les protestants et on le soupçonne d'être de ceux qui ont massacré le même jour une trentaine de prêtres catholiques. Son nom figure sur la liste des notables protestants qui étaient réunis la veille de l'attaque pour décider de la rémunération du capitaine Pouchot, le traître catholique qui allait ouvrir de l'intérieur les portes de la ville aux protestants.

Si Olivier de Serres a clairement joué un rôle au niveau local, il n'était pas un acteur d'envergure national. Son implication durera jusqu'en 1578, sans que l'on sache exactement de quoi ces années sont faites. On sait cependant qu'il se passionne toujours pour le jardinage et garde un oeil attentif sur son domaine.

Le théâtre d'agriculture et mesnage des champs (1578-1602)

En 1578, Olivier de Serres et sa famille s'installent finalement au château du Pradel.

Durant les années qui suivent, Olivier de Serres met en place des plantations expérimentales sur le domaine du Pradel. S'intéressant à la vigne et au vin, à la betterave, à l'importance du terroir, il développe des techniques et importe des espèces comme la garance, le houblon ou le maïs. Il voit l'agriculture et le jardinage d'une manière de plus en plus scientifique.

Olivier de Serres est le premier à mettre au point un processus permettant d'extraire le sucre de la betterave. Même si le procédé n'est finalement pas rentable, il est toutefois fonctionnel et ouvre la voie.

Olivier de Serres investit également beaucoup dans le bétail, notamment les boeufs et manifestera un intérêt très vif pour la soie après un voyage à Nîmes. Il en deviendra producteur.

En 1598, après que la paix avec les protestants fut proclamée par l'Édit de Nantes, Olivier de Serres part à Paris. Officiellement il y va pour régler des affaires familiales liées au décès de son frère Jean, officieusement, il emporte avec lui des manuscrits sur lesquels il travaille depuis quelques années et espère se faire publier.

Le 15 février 1599 paraît « La cueillette de la soye par la nourriture des vers qui la font. Échantillon du théâtre d'agriculture d'Olivier de Serres Seigneur du Pradel. » qui rencontre un beau succès et qui sera même traduit en allemand.

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Couverture de l'édition de 1663.

Le 1er juillet 1600 paraît « Le théâtre d'agriculture et mesnage des champs », publié par Jamet Mettayer. Ce jour là, Olivier de Serres entre dans l'histoire, ouvrant la voie au rationalisme scientifique, devenant le père de l'agronomie. Cet ouvrage sera réédité 19 fois et l'aurait été davantage si la révocation de l'Édit de Nantes n'avait pas eu lieu.

Le théâtre d'agriculture et mesnage des champs comporte huit chapitres:

- Du devoir du mesnager
- Du labourage des terres
- De la culture de la vigne
- Du bétail à quatre pieds
- De la conduite du poulailler
- Du jardinage
- De l'eau et du bois
- De l'usage des aliments

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Henri IV

La même année, après que Barthélemy de Laffemas, conseiller économique d'Henri IV, ait calculé les millions que coûte l'importation d'étoffes en soie, Olivier de Serres, désormais instruit sur la question après avoir expérimenté au Pradel, propose de produire de la soie en France et à grande échelle. Le roi lui fait confiance, ce sont ainsi 20.000 mûriers, l'arbre favori des vers à soie, qui sont plantés dans le jardin des tuileries et encore 10.000 à Saint-Germain-en-Laye.

Olivier de Serres fréquente à Paris les plus grands jardiniers qui se bousculent tous pour le rencontrer, notamment Claude Mollet, premier jardinier du roi et collègue de Jean Le Nôtre, père d'André Le Nôtre.

En 1602, conquis par la méthode d'Olivier de Serres, Henri IV ordonne à chaque paroisse d'avoir une pépinière de mûriers et une magnanerie.

Les dernières années d'Olivier de Serres, retraite et jardinage (1602-1619)

Olivier de Serres retourne ensuite au château du Pradel où il prendra progressivement sa retraite, poursuivant à titre privé ses expériences, pratiquant le jardinage pour le plaisir, sans que d'autres livres ne soient publiés.

En 1617, Marguerite de Serres décède, puis finalement, le 12 juillet 1619, Olivier de Serres, père de l'agronomie, s'éteint à son tour à 80 ans.

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Publié par sur Jardin Secrets le 27-07-2014

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